lundi 25 juillet 2011

le tour de France et le dopage: ou en est la présomption d’innocence?

Le tour 2011 s'est achevé dimanche dernier avec la victoire de Cadel Evens, le premier australien à remporter le grande boucle.
Sans être ce qu'il est convenu d'appeler un "aficionado" de la "petite reine", je m'intéresse néanmoins aux grandes compétitions, donc le tour, les championnats du monde et les JO. Concernant le tour de cette année, je n'ai véritablement suivi que les étapes de montagne et plus particulièrement celles des Alpes. Et la course contre la montre à Grenoble. Sans qu'il y ait pour autant la moindre trace de chauvinisme!
Tout a été dit sur les 10 jours en jaune de Thomas Voeckler, sur les défaillances de Alberto Contador, sur les timidités stratégiques des frères Schleck, la belle victoire de Pierre Rolland à l'Alpe d'Huez, aussi je ne m'y attarderai pas. Encore que ce jeune coureur sera peut-être le signe avant coureur du renouveau du cyclisme sur route français. On ne peut que le souhaiter. N'oublions pas que le dernier vainqueur français du tour a été Bernard Hinault en 1985!...
C'est au dopage que je voudrais consacrer l'essentiel de mon billet aujourd'hui. Parce que lorsque l'on parle du cyclisme, on pense automatiquement et systématiquement au dopage. Comme si le couple cyclisme - dopage était indissociable. Mais, n'est ce pas un peu plus compliqué que cela?
Certes, nul ne peut nier que pas mal de champions, et non des moindres, se sont fait prendre la main dans la confiture d'EPO. Nul ne peut nier non plus que nombre d'entraineurs et de kinés avaient plus dans leur cantine de seringues qu'il n'était nécessaire. Nul non plus ne peut nier que les marques qui sponsorisent les équipes ont besoin de résultats concrets pour rentabiliser leurs investissements, d'où une pression très forte exercée sur le peloton.
Pour autant, il y a quand même quelque chose de surprenant et, disons le, de choquant sur le soupçon permanent à l'égard du monde cycliste. Dans le cas d'espèce, la présomption d'innocence n'existe tout simplement pas: c'est un coureur professionnel, il gagne quelques courses, donc il est coupable. Forcément coupable, comme disait Marguerite Duras. Et il n'y a pas que la "vox populi" pour l'affirmer: les médias ne sont pas à la traine et ils sont même plutôt en pointe: on remarquera d'ailleurs qu'ils brûlent très facilement le lundi ce qu'ils ont adoré le dimanche.
Etant abonné, je lis chaque jour le Monde, journal qui n'est pas précisément un journal sportif. Mais il consacre une page, voire deux aux grands évènements sportifs, dont le tour. Les années précédentes, en plus d'articles strictement sportifs, il a fait appel à Greg Lemon pour commenter les étapes et ses commentaires étaient pour le moins chargés de fiel et de suspicion gratuite parce que jamais étayée de la moindre preuve tangible.
Cette année, toujours des articles consacrées aux différentes étapes, mais aussi quelques analyses  de  Antoine Vayer, professeur d'EPS, ancien entraineur de l'équipe Festina et expert de l'étude de la performance. C'est très certainement à ce titre qu'il développe une théorie où l'effort des coureurs cyclistes est transformée en watts. Je suis bien incapable de vous en dire plus sur cette théorie, sans doute très technique, mais qui permet à notre expert d'avoir un regard très critique, sinon accusatoire au regard des performances des coureurs.
Un exemple parmi d'autres: dans le journal daté du 24 juillet, il écrit, page 19: "Dans le Télégraphe, les muscles froids d'Alberto Contador - genou réparé en une nuit et déjà flashé à 460 watts pendant 20 minutes sur le col de Manse avant l'arrivée à Gap - ont pédalé 47 secondes plus vite que les recordmen de 2007: 30'26s à 23 km/h de moyenne pour gravir 12 kms à 7,09% de dénivelé." Et il conclut son article: "La dernière fois qu'aucun coureur n'avait été flashé au-dessus de 410 watts sur les cols de fin d'étapes du tour, c'était en 1999. C'est cette année-là qu'on a annoncé le premier "tour du renouveau". On connait la suite. Des traces d'EPO ont été retrouvées des années plus tard dans les urines de son septuple vainqueur, Lance Armstrong." On voit par là que le monsieur ne fait pas dans la dentelle: quand on utilise le terme "flashé", dont on sait qu'il est connoté avec excès de vitesse, on devine que ce n'est pas par hasard. Certes, mr Vayer se présente comme expert, mais on sait aussi que les experts, parfois, souvent même, sont tellement certains de leurs savoirs qu'ils finissent par se considérer comme la référence et comme telle, infaillible.
Que l'on se comprenne bien, lecteur attentif: je ne suis pas en train d'écrire que le dopage dans le cyclisme n'existe pas et que tous ceux qui affirment le contraire sont des médisants. Non, pas du tout. Mais il me semble que  les condamnations sans appel à l'encontre des coureurs ont quelque chose de commun avec le lynchage qu'il est convenu d'appeler médiatique. Ainsi, dans son édition datée du 3 juillet, le Monde, en première page, affiche une photo où l'on voit une nuée de photographes "mitrailler" à tout va le car d'une équipe que les gendarmes viennent fouiller. Ce genre d'info entretient, qu'on le veuille ou non, le soupçon et la défiance.
On peut aussi s'interroger sur le fait qu'il n'y a guère que le cyclisme pour être ainsi soupçonné. Il arrive que dans d'autres sports, certains contrôles se révèlent positifs et le ou les coupables sanctionnés, mais jamais d'aprioris aussi systématiques que dans le vélo. Et quels autres sports obligent ses champions à être disponibles à tout moment et en tout lieux pour subir tels ou tels contrôles anti dopage?
Quand je vois la ferveur dite populaire, les millions de gens tassés le long du parcours des étapes, des gens qui crient, qui encouragent et pour certains qui font prendre des risques insensés aux coureurs, quand je vois tout cela, que j'entends ce que j'entends et que je lis ce que je lis un peu partout au sujet du dopage de ces mêmes coureurs, je me dis qu'il y a là quelque chose qui cloche dans notre rapport à ce sport: on ne peut à la fois rendre hommage aux champions (et aux anonymes du peloton) et les accuser de tous les maux.
Ne pas jouer les vertueux que l'on soit spectateurs, commentateurs ou citoyen lambda, voilà qui serait une bonne idée. Et comme disait qui vous savez: "on voit toujours la paille dans l'oeil du voisin et jamais..."
photo Cadel Evans: AFP/ Lionel BONNAVENTURE
photos du peloton: AFP/ le Quotidien et Citizen Side

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