Dans les
armées du monde entier, une tradition existe depuis très longtemps: le
salut militaire: le subordonné salue son supérieur qui lui rend son
salut. Mais aussi pendant l’hymne national ou pendant la levée des
couleurs ou, en France, lorsque la flamme du Soldat Inconnu est rallumée
par une personnalité.
Il y a quelques temps, je suis tombé, par hasard, sur une vidéo sur youtube montrant une prise d’armes quelque part en France.
Je me suis alors demandé depuis quand remontait ce salut militaire et quelles en étaient les origines. d’où ce billet.
Ce salut
remonterait à l’antiquité: il s’agissait alors d’un signe de paix entre
deux guerriers de camp opposé qui, se rencontrant et pour montrer leurs
bonnes intentions, levaient la main droite, paume largement ouverte,
prouvant ainsi qu’ils n’étaient pas armés.
Au moyen-âge, c’était un
geste de courtoisie que deux chevaliers, avant un tournoi, échangeaient
en soulevant la visière de leur heaume.
Au XVII ème siècle, le geste
est repris et adopté par les militaires: ils lèvent la main droite vers
le ciel, en écartant trois doigts, faisant ainsi allusion à la sainte
trinité.
Il devient ensuite un geste de fraternité échangé entre deux militaires engagés dans le même combat.
Un peu plus tard, le geste s’arrêtera à la coiffe, chapeau, bérêt, casque, etc…
Ce n’est pas encore un geste de subordination d’un subordonné à un supérieur.
Au fur et
à mesure que l’on avance dans le temps, le salut se fera de plus en
plus solennel et obéira ensuite à une procédure très précise: le livre
de l’infanterie de l’armée française de 1916 édicte la règle: « Porter
la main droite ouverte au côté droit de la coiffure, la main dans le
prolongement de l’avant-bras, les doigts étendus et joints, le pouce
réuni aux autres doigts ou légèrement écarté. La paume en avant, le bras
sensiblement horizontal et dans l’alignement des épaules. L’attitude du
salut est prise d’un geste vif et décidé et en regardant la personne
que l’on salue. Le salut terminé, la main droite est vivement renvoyée
dans le rang. Tout militaire croisant un supérieur le salue quand il en
est à six pas et conserve l’attitude du salut jusqu’à ce qu’il l’ait
dépassé. S’il dépasse un supérieur, il le salue en arrivant à sa hauteur
et conserve l’attitude du salut jusqu’à ce qu’il l’ait dépassé de deux
pas. S’il est en armes, il présente l’arme en tournant la tête du côté
du supérieur. »(1) L’armée française est alors au plus fort de la
guerre, mais pour certains « planqués » au ministère de la guerre à
Paris, il importe que « la discipline reste la principale force des
armées. »
J’ai
retrouvé le « manuel du marin », édition 1963, que l’on m’avait donné en
arrivant à l’École des Mousses, tout en me recommandant de le lire très
attentivement et d’en connaitre l’essentiel.
Concernant le salut, page 50, la consigne concernant le salut du « marin isolé non armé du fusil » est la suivante: « porter
la main droite ouverte au côté droit de la coiffure, la main dans le
prolongement de l’avant-bras, les doigts étendus et joints, la paume en
avant, le bras sensiblement horizontal et dans l’alignement des épaules.« (2)
Daniel TANT* a écrit un article sur la symbolique du salut militaire où il avance une explication la concernant: « Mais
lorsque le militaire se trouve tête nue, que doit il faire ? Il ne peut
porter sa main à sa tempe puisqu’il n’a pas de couvre-chef, par contre
il reste militaire. L’inclinaison de sa tête vers la personne saluée
reviendrait au salut « à la japonaise ». Or, il conserve son droit à
rester stratège. Dans ce cas il donne un coup de tête, mais inversé
c’est-à-dire en arrière pour ne pas dévoiler ses pensées. C’est ce que
les militaires appellent le « coup de bouc ».
Cette explication vaut ce qu’elle vaut, mais elle peut s’appliquer en partie à la réalité.
Particulièrement
à l’armée, la hiérarchie est primordiale et demeure la pierre angulaire
des relations entre supérieur et subordonné. Mais pour les uns comme
pour les autres, il y a des droits et des devoirs. Enfin, pas tout à
fait: dans le manuel du Marin, page 46, une page résume les devoirs et
les droits du supérieur sur un quart de cette page. Les trois quarts
restant résument les devoirs des subordonnés et « le droit de
réclamation des subordonnés ». La nuance est d’importance.
Le salut
est la partie émergée, la plus visible de la discipline militaire. Il
est la marque de la subordination d’un subordonné à un supérieur. Mais
cela touche toute la hiérarchie: le matelot à l’officier marinier;
l’officier marinier à l’officier subalterne; l’officier subalterne à
l’officier supérieur; l’officier supérieur à l’officier général et
l’officier général – et c’est heureux – au Président de la République.
Bien sûr,
dans le civil, la hiérarchie existe et à bien des égards, elle n’est
pas vraiment différente de celle des armées. Sauf qu’on ne se met pas au
garde à vous devant son patron. Et qu’on ne lui dit pas « à vos
ordres » en le saluant et en claquant des talons. Mais ce n’est pas
l’objet de mon billet d’aujourd’hui.
Si dans toutes les armées du monde, le salut militaire est de rigueur, il ne prend pas forcément la même gestuelle.
Plus qu’un long discours, ces quelques photos montrent mieux ces différents saluts.
Pour
terminer ce billet, permettez moi une anecdote: il y avait quelques
semaines que j’étais à l’École des Mousses et avec quelques copains, je
déambulais un dimanche dans les rues de Brest, en uniforme évidemment.
Nos notes de la semaine avaient été bonnes et donc, nous avions la
permission du dimanche.
Nous avons aperçu un officier marinier en
tenue -que nous ne connaissions pas -et sa femme qui venaient en face de
nous, sur le même trottoir. Forts des consignes apprises dans la
semaine précédente concernant le salut dus au supérieur et des
répétitions avec nos instructeurs, nous l’avons salué,
réglementairement, c’est à dire six pas avant de le croiser et deux pas
ensuite. Il nous a rendu notre salut, bien sûr, et je me souviens qu’il
était plutôt embarassé. Et un de mes copains a dit à peu près ceci: « vous avez vu, sa femme lui donne le bras. Heureusement qu’elle était sur sa gauche parce que sinon, il était dans la m… »
(1) in https://www.defense.gouv.fr/actualites/articles/le-saviez-vous-le-salut-militaire, Carine BOBBERA, 15/01/2020
(2) in « Manuel du Marin » n° 5150 de la nomenclature des documents, édition 1963, page 50.
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