lundi 14 décembre 2020

"Françaises, Français"

 


 

 Voici le texte de l'allocution du Président de la République que vous auriez pu entendre hier soir.


Françaises, Français, mes chers, trop chers compatriotes.

Depuis le début de l'année, nous sommes confrontés à une pandémie d'une rare violence et à laquelle nous n'étions pas préparés.
Tous ou presque les États du monde sont atteints de ce virus qui a fait à l'heure où je vous parle plus d'un million de morts.

En France, même s'il y a eu des ratés, des tâtonnements, nous avons mis en place des dispositifs qui ont eu une relative efficacité. Comme nos voisins européens, mais aussi d'autres États à travers le monde.

Certes, nombre d'entre eux et pas des moindres, ont obtenu des résultats spectaculaires en mettant en oeuvre des procédures contraignantes et intrusives. Ce que nous et d'autres n'ont pas voulu ou pu réaliser.

Chez nous, le gouvernement, le Conseil Scientifique et moi-même n'avons pas su saisir une chance extraordinaire: celle d'écouter, de recueillir et d'appliquer les avis, les conseils et les injonctions des milliers, que dis-je, des millions d'épidémiologistes que notre pays bien aimé compte dans ses rangs. 

De même, nous n'avons pas entendu celles et ceux qui expliquaient doctement que le masque n'était qu'un gadget tout en nous accusant de ne pas en avoir suffisamment mis à la disposition de la population.

Début mars, nous avions pensé bien faire en demandant à chacune  et chacun de rester à la maison et de ne sortir que pour le strict nécessaire. Nous avions fermé les écoles et nombre de commerces tout en favorisant le télétravail et en indemnisant les salariés et les entreprises. Mais nombre de spécialistes ont pointé du doigt que fermer les écoles et universités allait à l'encontre de la nécessité de l'instruction publique et d'autres que cela nuisait gravement à l'économie.

Même si cette mesure s'est révélée relativement efficace, d'autres spécialistes ont jugé qu'autoriser les citoyens à reprendre une activité normale était prématuré et que le risque était grand pour les élèves et les étudiants de retourner en classe.

L'été a permis à beaucoup d'aller en vacances, de changer d'air et de retrouver familles et amis.

Mais le virus a continué de frapper, encore et encore et nos hôpitaux ont de nouveau été submergés et la mortalité due à ce virus repartir à la hausse.

Nous avons donc décidé de mettre en oeuvre un second confinement en facilitant toutefois les déplacements, en particulier pour tout ce qui concerne les activités professionnelles.  

Beaucoup de citoyen(ne)s épidémiologistes -et non des moindres- ont jugé que le gouvernement, le Conseil Scientifique et moi-même, nous nous affolions et surtout nous répandions la peur parmi la population.
Les mêmes ont jugé que fermer les lieux de culture, de sports, d'associations, de cultes était une atteinte insupportable aux libertés publiques et que nous étions, au gouvernement, les fossoyeurs de ces libertés. 


Des spécialistes ont longuement réfléchi et ont consenti à nous éclairer de leurs avis de spécialistes.
Mais, hélas, hélas, hélas, nous n'avons pas voulu ni écouter ni entendre tous ces citoyens spécialistes, connaisseurs, orfèvre en ces matières sans oublier les hommes et les femmes de l'art...

Et donc, nous pouvons les lire, les voir, les entendre un peu partout dans les médias nous rappeler à nous gouvernement, Conseil Scientifique et moi-même ce que nous aurions dû faire et ce que nous devons faire. 

Aussi, nous reconnaissons notre échec et nous nous inclinons devant tant de connaissances et de bonnes volontés.

Et pour aller jusqu'au bout de cette reconnaissance, nous allons tous démissionner. Moi le premier. Sachant qu'aucun d'entre nous ne se représentera et il en sera de même pour l'immense majorité des députés et sénateurs qui ont soutenu notre politique.

Il y aura donc de nouvelles élections, présidentielle puis législatives. Vous, citoyens, citoyennes, pourrez désigner celles et ceux, membres ou non des partis politiques qui, en spécialistes éminents qu'elles et qu'ils sont, sauront mettre en pratique leurs solutions pour endiguer la pandémie, mais aussi pour redonner à la France toutes les libertés qui lui ont été soustraites.

Vous, citoyennes, citoyens, vous aurez la parole et vos avis, vos conseils, vos injonctions seront mises en oeuvre par toutes et tous les spécialistes qui, depuis bien longtemps, vous caressent dans le sens du poil. 

À savoir:

gauche, droite, extrême droite, extrême gauche, centre, centre droit, centre gauche, libertaires, identitaires, écolos pro nucléaire, écolos anti nucléaire, anarchistes, pêcheurs à la ligne, chasseurs, croyants, non croyants, athées, cultureux, sportifs, LGBT, commerçants sédentaires ou non sédentaires, artisans et bien d'autres, toutes et tous seront collectivement à votre écoute et à vos côtés. Pour le plus grand bien des Françaises, des Français et de la France.

Pour ma part, je quitte mes fonctions avec le regret de ne pas avoir réussi à endiguer la pandémie, mais sachant que d'autres, celles et ceux cité(e)s plus haut, réussiront, enfin essaierons de réussir, en étant à l'écoute de tous les avis, de tous les conseils, de toutes les injonctions. 

Je leur souhaite bien du plaisir.

Vive la République, vive la France.


ps: j'ai failli ajouter "et vive les pommes de terre frites", mais bon, restons sérieux, je suis encore président jusqu'à minuit ce soir, donc encore dix minutes...

 


 

samedi 5 décembre 2020

Marie MARVINGT, "la fiancée du danger"

 

Marie MARVINGT

Nous connaissons tous plus ou moins Amélia EAHHART* ou Alexandra DAVID-NÉEL* ou Anita CONTI* , mais qui connait Marie MARVINGT?
Pas moi en tout cas, pas avant que l'un de mes collègues de l'AMPA me fasse parvenir un lien vers cette femme d'exception et que, poussé par une saine curiosité, j'aille à sa recherche.

Marie MARVINGT est née en 1875 à Aurillac au sein d'une famille dont le père était fonctionnaire des postes et grand sportif.
Toute petite, Marie est initiée à la pratique sportive par son père. Ainsi à quatre ans, elle nage quotidiennement ses quatre kilomètres dans une rivière voisine. Ne dit-elle pas qu'elle a apprit à nager en même temps qu'à marcher!...
En 1880, la famille Marvingt retourne en Lorraine, alors territoire allemand. À l'école religieuse où elle étudie, Marie parle allemand, mais à la maison parle français.
Licenciée es lettres, elle étudie la médecine et le droit et apprend quatre langues, ainsi que l'espéranto, puis obtient son diplôme d'infirmière.


Après avoir assisté à des représentations dans un cirque, elle suivra une formation de trapéziste, de jongleuse, de cavalière et de funambule.
À quinze ans, elle fait le trajet en canoë de Nancy à Coblence par la Meurthe et la Moselle.

En 1899, à vingt quatre ans, elle obtient "le certificat de capacité pour conduire des automobiles." Ce qui à l'époque est assez exceptionnelle.
En effet, suite à une augmentation des accidents causés par les autos dans la capitale, le préfet de police, Louis Lépine décide en août 1893,  la mise en place d'un "certificat de capacité", délivré par la préfecture à des hommes de plus dix huit ans.  La vitesse étant limitée à 20 km/h en campagne et douze en ville.
Pour la petite histoire, la duchesse d'Uzès* a été la première femme à obtenir ce certificat en avril 1898, mais aussi la première femme à avoir été verbalisée pour un excès de vitesse à... 15 km/h!!! 

Marie refuse le mariage et la maternité. Ce qui se comprend aisément quand on sait son intense activité.

Dès le début des années 1900, elle participe, sans y être forcément autorisée, à des courses de vélo:

  • 1904: Nancy - Bordeaux
  • 1905: Nancy - Milan
  • 1906: Nancy - Toulouse
  • 1908: le tour de France: malgré le refus des organisateurs, elle participe à toutes étapes en partant peu après les coureurs. Elle terminera l'épreuve comme 36 hommes des 114 au départ!

Il n'est pas inutile de rappeler qu'à cette époque les femmes n'avaient pas le droit de porter le pantalon. Faire du vélo en compétition n'étant pas très efficace, elle porte la jupe culotte... 

En 1907, elle obtient le prix d'honneur de tir au fusil à 300 mètres, organisée par le ministère de la guerre.


Marie Marvingt
Mais elle ne fait pas que du vélo: en juillet 1905, elle fait la première féminine de la traversée Chamoz - Grépon* en 18 heures avec deux guides. D'autres escalades, la dent du Géant, la dent du Requin sont à mettre à son actif.
Entre 1908 et 1910, elle remporte plus de vingt médailles d'or à Chamonix dans des compétitions ausi différentes que le ski, le patinage artistique ou le gymkhana sur glace.
En janvier 1910, elle remporte la compétition féminine de bobsleigh à Chamonix.

 Mais elle a une autre passion: l'aviation.

 




Elle débute en 1901 par un vol en ballon libre. Et là encore, elle ne fait pas les choses à moitié: en 1910, elle gagne le premier prix du concourt de distance entre Nancy et Neufchâteau ( Belgique).
En 1909, elle fait un voyage imprévu - et mouvementé -de 720 kms en 14 heures au-dessus de la mer du Nord.



Bien sûr, elle décide d'apprendre à piloter: le 8 novembre 1910, elle obtient son brevet de pilote. Elle est la troisième femme au monde à obtenir ce brevet.


Avec des industriels de l'aviation, elle va essayer de mettre au point une aviation sanitaire aux couleurs de la Croix Rouge. Elle conçoit avec un ingénieur un prototype qui ne sera jamais construit. Malgré le soutien de la direction de l'Aéronautique Militaire, du ministre de la guerre  et la présentation au salon de l'aviation, le projet n'aboutit pas, faute de financements.


Au cours de la première guerre mondiale, elle tente d'intégrer l'armée de l'air française. Remplaçant un pilote blessé, elle participe à deux bombardements, ce qui lui vaut la Croix de Guerre. Pour autant l'armée refuse de l'intégrer.


Marie Marvingt en soldat


En désespoir de cause, elle devient infirmière major pendant deux ans. Mais l'action lui manque: elle se fait passer pour un homme et intègre, comme simple poilu le 42ème bataillon de chasseurs à pied. Après 47 jours passés en 1ère ligne, elle est démasquée et doit quitter le front.

 

Le 11 novembre, lors de l'entrée de Maurice Genevoix au Panthéon, dans son discours, le Président Macron a évoqué Marie Marvingt:

"Marie MARVINGT, qui voulait tant défendre son pays qu'elle se déguisa en homme pour combattre en première ligne."

Elle sera cependant autorisée par le maréchal Foch en personne à rejoindre le 3ème régiment de chasseurs alpins en tant qu'infirmière.

 


 La guerre terminée, elle continue ses activités sportives: en avril 1920, elle établit un record de marche de 57 kms.

Mais si c'est une sportive accomplie, elle est aussi une intellectuelle reconnue: elle multiplie les conférences partout dans le monde, en Afrique, aux USA auprès de publics variés.
Elle se fait la propagandiste de l'aviation en général et de l'aviation française en particulier.
Elle écrit des articles pour plusieurs quotidiens: l'Excelsior, l'Intransigeant, le Figaro. 

En 1935, elle est nommée chevalier de la Légion d'Honneur.
À la même époque, en Mauritanie, elle met au point un ski métallique qui lui permet de skier sur les dunes du désert saharien. Un peu plus tard, les forces aériennes françaises adapteront ces skis sur les avions pour les atterrissages sur la neige.

Pendant la seconde guerre mondiale, elle est infirmière de l'air et met au point une suture chirurgicale qui permet de recoudre les blessures plus rapidement, évitant ainsi les infections. Elle travaille également avec des réseaux de résistance.

En 1959 - elle a 84 ans!!! - elle passe son brevet de pilote d'hélicoptère et l'année suivante, pilote le premier hélicoptère à réaction* au monde!!!
En 1961, en vélo, elle relie Nancy à Paris, pédalant dix heures par jour!!!

Marie Marvingt arrive à Washington

Marie Marvingt meurt le 14 décembre 1963, dans une sorte d'anonymat. Il est vrai qu'à cette époque, les détentrices de record ne faisaient pas la "une" des journaux, même si elle était couverte de médailles, reconnue comme une des femmes les plus étonnantes et des plus courageuses de ce XX ème siècle. 


À Aurillac, une modeste rue porte son nom. Mais pour ce que j'en sais, pas une ville, pas un village de Lorraine n'a donné le nom de Marie Marvingt à une rue, une place, un boulevard. Pas même à une impasse.

Allez comprendre...

Aussi bizarre que cela puisse paraitre, elle ne percevait pas de pension de retraite. 

Ce qui est tout aussi bizarre, c'est qu'elle soit tombée dans l'oubli. Sans doute parce qu'elle est morte dans son lit ou qu'elle ne faisait pas les gros titres de la presse à scandales. Allez savoir...


Elle a été surnommée par une revue "la fiancée du danger". Et c'est vrai que le danger, elle l'a côtoyé tout au long de sa vie. Sans pour autant le provoquer.


Pour conclure ce billet, je vais citer ce qu'a dit Marie Marvingt un mois après après un accident qui aurait pu lui coûter la vie le 12 décembre 1913, alors que l'avion qu'elle pilotait, à cause d'un brouillard particulièrement épais, avait dû atterrir en catastrophe dans un champ:
"Une fois de plus je reste la fiancée du danger, mais le mariage n'a pas été loin... [...] Mon casque était complètement enfoncé dans la terre, mon visage baignait dans le sang. Écrasée sous la masse de mon appareil, je respirais difficilement. Heureusement qu'avec ma main gauche, je pus creuser la terre près de ma bouche pour me permettre d'aspirer un peu d'air."


 


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claudebachelier@wanadoo.fr

 

Soixante ans..... Déja!!!!

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