dimanche 13 février 2022

Le pourquoi du comment des choses: Félix KIR

 

 

Félix KIR
 

Nous avons tous, plus ou moins, entendu parler un jour du "chanoine Kir". Nous connaissons tous, plus que moins, le "kir", simple, c'est à dire un savant mélange de vin blanc et de sirop de cassis. Pour le royal, au lieu du vin blanc, un champagne brut.


Pour ce qui est du chanoine, y a t-il une relation de cause à effet entre la boisson et ce religieux?
À priori, oui: maire de Dijon en 1945, il organisait parfois des réceptions où était servi ce cocktail.

Mais qui était ce curé, cette figure quasi légendaire, resté dans une certaine mémoire collective? Et pourquoi une telle place dans cette mémoire?

 

 

D'origine alsacienne, il est né en 1876 à Alise-Sainte-Reine, un village de la Côte d'Or. Il rentre au séminaire en 1891 et est ordonné prêtre en 1901.
Jusqu'en 1924, il va officier dans quelques paroisses du pays bourguignon. Pendant la guerre, il est affecté dans les services médicaux. En 1931, il est nommé chanoine à Dijon. Pour mémoire, un chanoine est un prêtre chargé de certaines missions spécifiques au sein d'une cathédrale.

Quand l'armée allemande arrive à Dijon en 1940, Kir, bien que faisant partie de la délégation municipale suite au départ du maire, se montre hostile à l'armée d'occupation.
Il profite de cette fonction pour faire évader plus de 5000 soldats de l'armée française retenus prisonniers. Il sera brièvement emprisonné, mais n'exercera plus de fonctions au sein du conseil municipal.

Il est ouvertement hostile au régime de Vichy, ce qui lui vaudra d'être blessé par balles par des membres d'une organisation collaborationniste. Alors qu'il est recherché par la Gestapo, il s'évade pour,  le 11 septembre 1944, revenir à Dijon lors de la libération de la ville.

F. Kir lors de la libération de Dijon

Devenu dès lors une personnalité importante de par ses prises de positions politiques, il est élu maire de Dijon en mai 1945 et dans la foulée, élu conseiller départemental et député. Trois mandats pour un seul homme, c'était la belle époque de ces élus "cumulards"!

 

Maire de Dijon, député, conseiller général

En tant que maire de la ville pendant une si longue période, Kir a entrepris plusieurs travaux d'urbanisation dont  la construction d'un lac artificiel qui permit de réguler les crues de l'Ouche, une rivière dont les crues régulières posaient de nombreux problèmes aux riverains et aux agriculteurs.


À Dijon, le 23 décembre 1951, le Père Noël est brulé en effigie sur le parvis de la cathédrale devant 250 enfants par des membres du clergé. Pour se justifier, ces intégristes affirment que "pour nous chrétiens, la fête de Noël doit rester la fête anniversaire de la naissance du sauveur." 

Bien que cette initiative imbécile prise par certains membres du clergé local, soutenue par la hiérarchie catholique, le chanoine Kir, partisan selon lui d'un "catholicisme social", l'a condamnée fermement et, symboliquement, a ressuscité le Père Noël en organisant une contre manifestation.  

Député inscrit au parti Centre National des Indépendants et Paysans (CNIP) dont fit partie le président Giscard d'Estaing, il siégeait à l'Assemblée Nationale en soutane. Comme d'ailleurs l'abbé Pierre.


Il était connu également pour ses bons mots, pas toujours d'une grande délicatesse: à un député communiste qui lui affirmait ne pouvant pas croire en Dieu parce qu'il ne l'avait jamais vu, il répondit: "et mon cul, tu l'as pas vu, et pourtant, il existe".

 

avec N. Khrouchtchev, président di Conseil des Ministres de l'URSS

En 1960, il rencontre Nikita Khrouchtchev à l'ambassade d'URSS à Paris contre l'avis de son parti. Rencontre qui officialise le jumelage en 1959 de Dijon avec Volgograd, anciennement Stalingrad.
Cette "proximité" avec l'URSS lui vaudra d'être réélu en 1962 contre un candidat gaulliste grâce au désistement au 2ème tour du candidat communiste.

 

Président de l'Assemblée Nationale lors de la première séance parlementaire de la Vème République

Doyen de l'Assemblée Nationale, c'est lui qui présida la première séance parlementaire de la Vème République.

Félix Kir n'a jamais été gaulliste. Claude Patriat, professeur émérite à l'université de Bourgogne écrit même que Kir était "violemment anti gaulliste."


 

Pourtant, lors de sa viste à Dijon, le président Français déclare: "En octobre 1944, dans les grandes joies et les grandes espérances de la Libération, j’avais à ce moment-là, à côté de moi, le maire que vous avez aujourd’hui."(1)
Le voyage présidentiel se termine à Beaune où ne doutons pas que le Chef de l'État a dû goûter au fameux kir... Mais l'histoire ne le dit pas.

 


Félix Kir est décédé le 25 avril 1968, à 92 ans. Jusqu'à cette date, il était encore député, maire de Dijon et sans doute toujours conseiller général.

La postérité tient à son parcours politique, d'une longévité  particulière. Car, à la différence d'un Chaban-Delmas (maire de Bordeaux de 1947 à 1995), d'un Guy Mollet (maire d'Arras de 1945 à 1975) ou d'un Defferre (maire de Marseille de 1944 à 1946 et 1953 à 1986), il n'a pas eu de rôles marquants pendant la guerre et pas de responsabilités politiques nationales importantes. Il est vrai que sa gouaille et son apparente proximité avec les gens ont joué en faveur du personnage.


Mais le cocktail attaché à son nom, lui aussi, a contribué à son ancrage dans la mémoire collective, en particulier, bien sûr, en Bourgogne. 

Mais, les jeunes générations, les enfants des "baby-boomers", leurs petits enfants, savent-ils, quand ils demandent un kir, que cette boisson tire son nom d'un chanoine?


 

 

(1) in https://france3-regions.francetvinfo.fr/bourgogne-franche-comte/archives-gaulle-bourgogne-histoire-complexe-1891250.html


 

le recueil sur: https://www.youtube.com/watch?v=Tq7eFXwQAR0

disponible à


librairie Tuliquoi Allevard
fnac.com/livres
www.decitre.fr/livres
www.librairie-obliques.fr/livres
https://www.lysbleueditions.com/produit/trois-cents-dollars/  
 
ou

claudebachelier@wanadoo.fr


mercredi 2 février 2022

le pourquoi du comment des choses: Rose DEWITT-BUKATER

Nous nous souvenons tous du film de James Cameron*: "TITANIC", diffusé sur les écrans du monde entier en 1997.


Pour retracer la fin de ce paquebot réputé insubmersible, Cameron va reprendre quelques personnages qui ont réellement existé, mais surtout inventé de toutes pièces une femme, Rose Dewitt-Bukater, interprétée par Kate Winslet*, et un homme, Jack Dawson, interprété par Leornardo Di Caprio*

 


Mais qui était en réalité cette Rose Dewitt-Bukater, l'objet de mon blog d'aujourd'hui?


Béatrice Wood avec Francis Picabia et Marcel Duchamp
 

Pour créer ce personnage, J. Cameron s'est inspiré de deux femmes qui ont réellement existé:  Béatrice WOOD* et de Helen CHURCHILL CANDEE*.

 

Béatrice Wood n'a jamais mis les pieds sur le Titanic.

Issue de la bonne société américaine, elle est née en 1893 à Chicago.

C'est une jeune femme plutôt rebelle, en tout cas pour les critères de l'époque s'appliquant aux femmes. Elle est fortement anticonformiste et rejette les conventions, les bonnes manières de son temps. Et c'est cela qui séduit le metteur en scène.
 

Béatrice Wood: "autoportrait"

Devenue une peintre assez célèbre, elle vit plusieurs années en France et sera très proche de peintres reconnus, tel Marcel Duchamp. ou Francis Picabia
 

En 1910, elle crée avec Duchamp "the blind man", le magazine Dada, première manifestation de ce mouvement aux USA. Elle est surnommée "Mama of the Dada" et participe en 1971 à un film documentaire: "naissance de l'esprit Dada".


Béatrice WOOD

J. Cameron a aimé ce genre de personnage et, après avoir lu son autobiographie, il lui demande la permission de venir l'interviewer. Elle refuse en affirmant "je n'ai que 35 ans"!!! Effectivement, c'était son âge au moment du naufrage, mais quand Cameron l'appelle, elle a 102 ans. D'ailleurs, souvenons-nous: au début du film, nous voyons Rose en train de faire de la céramique...

Helen Churchill Candee

Helen Churchill-Candee* était sur le Titanic lors du naufrage.

Elle est née en 1858 à New York. Journaliste, architecte d'intérieur, elle écrit "How Women May Earn a living" qui la révèlera comme une ardente féministe.
Alors qu'elle réside à Londres, son fils s'étant blessé aux USA en 1912, elle décide de le rejoindre et embarque donc sur le Titanic. Elle est évacuée sur le canot de sauvetage numéro 6 et se blessera à la cheville en montant à bord.

Pour l'anecdote, elle voyageait en 1ère classe et avait fait la connaissance de Edward Austin Kent*, architecte d'intérieur lui aussi. Alors qu'elle ne pensait pas pouvoir survivre, elle lui confie une miniature en ivoire et en or appartenant à sa mère. Mais Kent ne survivra pas et les sauveteurs récupéreront le camée sur son corps, camée qui sera rendu à Helen Churchill.

J. Cameron a lu le livre qu'elle a écrit après le naufrage et s'en est inspiré: "Titanic Survivor: life boat N° 6" .

le dernier menu du Titanic

Dans cet ouvrage, elle décrit avec une grande précision la vie très luxueuse des 1ères classes à bord du paquebot, les gens qu'elle croise. De même, elle raconte la rapide agonie du paquebot avec beaucoup de détails:

"L'étrave endommagée a désormais disparu sous l'eau. L'unique espace de pont déborde en l'air au-dessus de l'arrière du navire et, en cet endroit diminué, se blottit un groupe de passagers entassés, attendant la mort avec un transcendant courage et un calme qui a été le leur durant les deux dernières heures”

La vie à bord et le naufrage lui-même ont permis à J. Cameron de réaliser un film dont la précision des personnages et des évènements ont contribué au succès que l'on sait.


À tel point que lorsque que Jack a lâché la main de Rose, bien des gens dans les salles obscures ont versé une petite larme. 

Sans oublier le "Oh non" quand Rose, à la fin du film laisse tomber à l'eau le fabuleux bijou...

 


 
 
 
 
 

 


le recueil sur: https://www.youtube.com/watch?v=Tq7eFXwQAR0

disponible à


librairie Tuliquoi Allevard
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www.decitre.fr/livres
www.librairie-obliques.fr/livres
https://www.lysbleueditions.com/produit/trois-cents-dollars/  
 
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Soixante ans..... Déja!!!!

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