dimanche 27 avril 2014

Manuel Valls à la messe


Manuel Valls, Premier Ministre de la République Française, "indivisible, laïque, démocratique et sociale" (article  premier de la Constitution) (1) s'est rendu le dimanche 27 avril 2014, au Vatican pour assister à la canonisation de deux anciens papes. Si une cérémonie est bien marquée du sceau de la religion, c'est bien celle-là. Ne serait-ce que par la présence de milliers - de millions?- de catholiques venus de tous les continents pour y assister.

Nous pouvons donc légitimement nous interroger sur la présence à cette cérémonie du deuxième personnage de l'Etat. D'autant que nous avons un ambassadeur au Vatican et que sa seule présence était largement suffisante.

Pour ma part, je suis scandalisé par ce déplacement de Manuel Valls à un évènement strictement religieux et destiné uniquement aux croyants.

Depuis belle lurette, la France n'est plus "la fille ainée de l'église". Et on ne peut que s'en féliciter. La loi de 1905, dite "loi de séparation des églises et de l'Etat" a fixé les limites du spirituel et du temporel, de sorte que l'un n'empiète pas sur l'autre, et réciproquement. Aujourd'hui, alors que certains communautarismes religieux reprennent de la vigueur, cette loi nous protège des intégrismes et donc de l'obscurantisme.

La présence du Premier Ministre à Rome laisse entendre que la France reste associée aux affaires de l'église. Non seulement associée, mais partie prenante. Un peu comme si la canonisation de ces deux papes avait quelque chose à voir avec notre pays. Ce qui n'est bien sûr pas le cas, ce bâton de maréchal accordé à ces religieux étant une affaire strictement et uniquement catholique. Imagine t-on un instant le pape assister à Paris à une cérémonie d'accueil de l'un de nos grands hommes au Panthéon? Bien sûr que non, l'ambassadeur du Vatican (le nonce apostolique) étant sur place pour le représenter.

Et puis, comme beaucoup, je n'ai pas la mémoire courte: en 2011, lorsque François Fillon alors Premier Ministre, s'étant rendu à la cérémonie de béatification de Jean Paul II, le Parti Socialiste avait trouvé "cette présence choquante" et n'avait pas eu de mots assez durs pour la dénoncer. Aujourd'hui, silence radio! Je suis allé sur le site du PS: pas un mot, pas une ligne! Comme si Manuel Valls avait passé cette journée de dimanche en famille ou travaillé à son bureau. Ce que, de toute évidence, il aurait dû faire.

Oui, la présence de Manuel Valls à Rome est choquante. Tout comme l'était celle de François Fillon. Tout comme l'est la présence des plus hauts représentants de l'Etat aux réunions du Conseil Représentatif des Institutions Juives (CRIF) ou de l'Union des Organisations Islamiques de France (UOIF) ou du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM).

Il est vrai, hélas, que mises à part quelques décisions sociétales, certes d'importance, la politique menée aujourd'hui peut se calquer aisément sur celle du précédent quinquennat. Nous avons changé de président, mais pas de politiques. Manuel Valls à Rome pour la canonisation de Jean XXIII et de Jean Paul II en est la détestable illustration.

Je ne le répèterai jamais assez: la France ne renie rien de son passé, fût-il religieux. Pour autant, la France est un pays laïque et, comme tel, doit se tenir à distance des religions. De toutes les religions. Parce que comme l'affirme l'article 1er du la loi de séparation des églises et de l'Etat; "La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public."

Comme le dit l'adage populaire: "chacun chez soi et les vaches seront bien gardées"

(1) in "la Constitution", introduite et commentée par Guy Carcassonne, page 41, éditions du Seuil, collection "Points Essais", 9ème édition 2009.

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